Chapitre Premier
L’Emigration vers la Floride
Je passais ma sieste, étendu sur une dune de sable mélangé à de la
misère, représentée par les décombres et les taudis vidés des traces de la vie
et des vivants. Je pensais à ce qui était hier des ruines et qui était devenu
un mirage et des destructions totales. En dessous de ces monticules à la merci
des vents, artificiellement créées par l’homme, reposent les cadavres de ma
mère et de ma sœur qui se sont élevées vers le Miséricordieux comme des martyrs
et qui résident involontairement sous les décombres de notre pauvre quartier,
au cours de l’une de ces campagnes de génocide que le régime cancéreux qui
s’accroche à l’Iraq a lancée contre les Musulmans qui se sont révoltés contre
son injustice et sa tyrannie, au Sud, en particulier et ce, sous les yeux
indifférents de la communauté internationale, et une tolérance de la part des
Etats-Unis d’Amérique, le sponsor des méfaits et des intrigues sur terre1.
Quant à mon père, il a précédé les martyrs de la famille auprès du
Compagnon Supérieur lorsqu’il a refusé de tendre la main à l’injustice, de
baisser sa tête et d’abaisser son honneur et sa dignité. Il a choisi le martyr
au cours d’une escarmouche courageuse avec une poignée d’agent de l’escadron de
la mort lorsqu’ils l’ont surpris dans son Mihrab, en train de prier, qui se
sont ensuite retirés avec trois de leurs collègues tués et qui sont repartis
avec les conséquences de sa mort et du crime perpétré contre lui, l’Imam sage[1].
J’étais ainsi, en train de me rappeler les malheurs, et
de causer avec les décombres et les ruines, lorsque mon oncle est venu[2] me surprendre avec la
nouvelle de sa décision d’émigrer pour aller travailler dans l’État de Floride,
aux Etats-Unis. J’ai été envahi par l’idée qu’il allait partir avec toute sa
famille et ceux sous sa garde – comme moi qui n’avait plus de parents que mon
oncle, après que tous les autres membres de ma famille soient devenus des
martyrs, des exilés ou des détenus – et qu’il quittait la patrie du cancer – le
régime de Saddam incrusté dans la réalité de l’Iraq – pour aller dans la
mâchoire du démon. J’ai failli étouffer et m’égarer dans le désert de ma peine
et de mon silence, lorsque mon oncle est venu mettre sa main gentiment, sur mon
épaule, et qu’il a dit : c’est, mon enfant, la décision de celui qui n’a
pas un autre choix. Nous n’avons plus de quoi subsister et notre situation est
telle que tout espoir est perdu, de même que nos moyens de patienter et de
supporter. Et il n’y a de force qu’en Dieu le Tout Puissant. Ce qui est pire,
c’est que nous serons privés d’une grande partie de nos pratiques religieuses
et de nos rites, ceci nous donne une excuse infime pour le séjour et donne à
l’émigré la qualité des croyants moujahidines.
Mon pauvre oncle est parti, abattu et embarrassé, la
fatigue apparaissant sur sa marche titubante, au-dessus du sable. L’effet de sa
décision est resté très lourd et il s’est mis à se transformer en moi et à se
développer ; à tel point qu’il est devenu une autre personne en mon être,
augmentant avec mes soucis et accompagnant l’engagement pris envers mon Dieu,
de me venger des injustes et d’arracher l’œil du monstre humain américain.
Je me suis mis à passer en revue les images de la vie en
mouvement, habité par la tristesse, fixé par les épreuves. J’ai souhaité, un
moment, être pris par le sommeil pour m’endormir, ou que me revienne en
mémoire, un fait quelconque qui dissipe tout le reste. La peur était devenue
une partie inhérente de nous ; les soucis étaient devenus si grands qu’ils
nous ont poussés à rechercher le refuge du diable, qui les a appelés et qui
leur a intimé l’ordre de nous maltraiter et qu’ils ont fait[3].
J’ai pensé que si l’injustice de Saddam était une
calamité, l’injustice de l’Amérique était pire, que son agression était plus
méchante et plus générale ; et que si par hasard j’avais en main les rênes
du pouvoir, et si ma volonté devait prendre une décision, je serais resté sur
le sol iraquien que j’aurai irrigué de mon sang. Je lui aurai fait respirer la
brise de la révolution comme un feu qui consume le visage des saddamistes
iniques, de leurs alliés américains et de leurs autres alliés.
J’ai caché ce désir comme détermination et volonté ferme
et j’ai sollicité l’aide de Dieu afin qu’il me donne la force de la victoire grâce
à sa bonté.
1 Chaque fois que Saddam a commis une injustice, l’Amérique y avait sa part
et son butin, et aucun d’eux n’a jamais porté du tort à l’Iraq sans que son
frère diabolique ou son partenaire cancéreux ne soient de connivence.
L’Amérique a fermé les yeux sur les méfaits et les crimes de Saddam pour
trouver un prétexte pour envahir l’Iraq, comme elle l’a fait lors de sa
campagne agressive contre le Koweit au début des années quatre vingt dix, cette
campagne qui a porté les Etats-Unis aux sources de l’énergie et des artères de
la vie arabe. L’Amérique a même fait montre de renardise en laissant faire les
événements du 11 septembre, lorsqu’elle s’est abstenue de prendre les mesures
nécessaires pour empêcher la série des préparatifs du coup de la Qaïda afin de
trouver un prétexte qui justifie ses intentions d’attaquer le monde islamique,
de mettre la main sur les sources de l’énergie et de protéger Israël, le fruit
des relations adultères de l’Occident sionisé avec le judaïsme despote.
L’Amérique avait auparavant, vers la fin de la Deuxième Guerre Mondiale, fermé
les yeux de manière délibérée sur les préparatifs de l’attaque aérienne japonaise
contre la flotte américaine à Pearl Harbour afin de trouver un prétexte qui lui
permette de lancer les deux bombes de Hiroshima et Nagazaki. Il a été, en
effet, révélé que le commandement américain était au courant de l’attaque
japonaise qui, de décision était devenue de véritables préparatifs, et ce,
quelques jours avant l’attaque. L’Amérique nous a habitués à révéler beaucoup
de documents importants après les catastrophes.
[1] Mon père, Dieu
ait son âme, était l’Imam du quartier et son prédicateur. Il était connu pour
son courage, sa générosité, sa science et sa piété.
[2] L’Amérique est
d’après moi, et selon le testament de mon père, un monstre humain qui agit avec
un cerveau infernal, une conscience juive ; qui voit avec un œil au milieu
de son visage et qui ne voit jamais du bien sur terre. Ce monstre humain est
celui qui a rempli la terre de terreur lors du septième voyage de Sindbad.
[3] Le refuge du
diable: c’est à dire l’Amérique. C’est elle, en effet, qui a invité le régime
de Saddam, à pratiquer l’injustice. Elle l’a utilisé pour fabriquer ses
prétextes et ses justifications pour les invasions. C’est elle qui lui a
ordonné de nous disperser puis elle a ouvert ses portes devant nous pour
laisser le champ arabe libre devant le flux sioniste.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire