samedi 3 août 2013

La Soucoupe Agile

La Soucoupe Agile

Aux premières heures du jour prévu, je hâtais  le pas vers l’endroit qui était désert de tout sauf de la peur, plat sauf les figuiers de Barbarie, et qui était devenu plein d’espoirs et de rêves. Je suis allé sur une petite dune, attendant l’heure de l’arrivée de Ronca Cham. Je suis resté ainsi un certain temps qui m’a paru beaucoup plus long et, lorsque la fatigue était sur le point de m’acculer au désespoir, j’ai vu une soucoupe couleur de vin et un disque imposant, brillant comme les lustres du ciel, qui est venu se poser à côté de moi. Je me suis dirigé vers lui précédé par mon envie et ma passion. Mon Dieu comme sa rencontre était belle et beaux ses yeux. La belle fille de Cham est apparue à la porte de l’engin, brillante et superbe. Elle a couru vers moi en criant et en répétant mon nom ; et j’ai couru vers elles. Nous nous sommes rencontrés à la frontière que le Très Haut a interdit aux  croyants de dépasser. Chacun de nous a alors voyagé dans les yeux de l’autre. Elle s’est mise à genoux entourant mon genou avec une envie sans borne. J’ai pensé que le royaume de la terre était entre me mains, car je vivais des moments que toute la vie ne peut égaliser, et des secondes que je n’échangerais jamais contre une couronne ou un poste élevé.

Je l’ai prise par les épaules, essayant de la rapprocher de moi, alors que ma volonté et ma patience m’ont soudain trahi, et mes larmes ont coulé après avoir été si longtemps retenues.

Ronca Cham a eu peur en me voyant pleurer. Ma tristesse lui a fait de la peine. Elle a pris ma tête entre ses mains vers son épaule, et elle a dit : « Malheur à ma mère et à mon père, que t’est-il arrivé, mon frère Ark­âne Eddine ». Je me suis abstenu de répondre. Elle a insisté, et j’ai dit : « Je n’ai plus de parents sauf un pauvre oncle que le despotisme pousse à quitter l’Iraq, et une occasion s’est présentée à lui en Floride, aux Etats-Unis ». Elle a dit : « Pourquoi, mais alors, ne va-t-il pas dans un autre pays arabe ou un pays musulman, alors que ceux-ci sont nombreux et les gens y sont aisés ». J’ai dit : « L’Iraq avec la tyrannie de Saddam est mieux que ces pays-là. Ici, nous crions et nous souffrons, nous nous plaignons et nous nous affrontons. Les Arabes des autres pays ont perdu toute sensation. Ils ne crient pas. Leur peau s’est endurcie, ils ne souffrent plus. Ils se sont habitués aux défaites ; ils ont choisi la faiblesse. Ils ont remplacé le Jihad par la soumission qu’ils ont cru être l’Islam. C’est ainsi que sont les Arabes, et comme eux sont les Musulmans qui suivent la même voie… Je voulais aller plus loin, je fus saisi d’un vertige semblable à un courant auquel j’ai essayé de résister sans succès. Je suis tombé à terre les yeux fermés. En les ouvrant, j’ai vu Ronca au-dessus de ma tête. J’ai cru la voir pour la première fois, et je me suis levé tout droit en lui demandant où j’étais et quand je suis venu. Elle ne savait quoi dire. Un profond silence régna un moment après quoi j’ai compris que j’avais perdu connaissance. Je l’ai regardée avec chaleur et tendresse et je lui ai dit : « Excuses-moi, ma sœur Ronca d’avoir trempé notre rencontre avec des plaintes ».

Elle a répondu, ses larmes coulant sur son visage : « Il y a dans ton for intérieur une fierté mohamédane arabe, et j’ai bien peur qu’elle ne se manifeste avant son heure, et tant que je suis en vie, tu ne vas pas traverser les jours et les horreurs tout seul.


J’ai fermé les yeux devant la majesté de son attitude. Je me suis mis à lui souhaiter tout le bien en secret et à remercier Dieu, le Dieu des mondes.

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