La Catastrophe
Gina avait hérité de
son grand père paternel, Sir William Stevenson, une belle villa au cœur de la
région située sur la côte Est de la Floride. Cette situation sur l’Océan
Atlantique avait, en elle, un amour supplémentaire, pour ce qu’elle signifiait
comme lien entre l’Occident et l’Orient.
Je me trouvais à
Michigan, en visite chez Cheikh Hamad Qassimi pour lui demander quelques
informations sur les procédures de mariage et les formalités officielles aux
Etats-Unis en préparation du contrat que j’envisageais avec Gina, lorsque m’est
parvenue comme une foudre, la nouvelle d’un ouragan qui venait de frapper la
côte Est de la Floride.
J’avais quitté West
Palm Beach alors que ma bien aimée avait l’intention d’y amener Umm Ahmad et
les enfants en vacances. Dès que j’ai appris la nouvelle, je me suis adressé au
Dieu des mondes, implorant sa bonté. J’ai ensuite cherché à partir vers la
villa de mes rêves sur les sables de l’Atlantique. Une fois sur place, ce fut
comme un vertige qui s’est emparé de moi. J’ai senti comme si j’étais enlevé de
ce monde et je suis tombé sur le sable, craignant pour ma chérie.
J’étais abattu en
voyant les ambulances et les secouristes s’agiter dans un va et vient ininterrompu,
essayant de réduire les conséquences de cette catastrophe et de sauver ceux qui
étaient encore en vie sous les décombres.
Je suis allé vers
l’hôpital principal de la région et, après avoir examiné les différentes
sections de l’établissement, j’ai vu le frère aîné de Gina, John Stevenson,
sortant de la salle de soins et de réhabilitation, le visage coloré par la
peur, jaune comme un citron. Dès qu’il m’a vu, il s’est jeté sur moi comme
quelqu’un qui vient de trouver un être après l’avoir cherché en vain. J’ai
demandé des nouvelles de Gina et il m’a pris par la main et il m’a conduit
devant son lit. Là bas, au-dessus du visage angélique de ma chérie qui
souffrait, j’avais les nerfs tendus, mais je me suis retenu, remerciant Dieu et
j’ai dit à John : « si seulement vous pouviez m’amener deux témoins
musulmans et un ma’zoune1 avant
qu’elle ne se réveille. Il a accepté et il et revenu avec deux hommes de
couleur qui étaient – je l’ai appris plus tard, - les deux nouveaux gardiens.
J’ai regardé John et
il m’a dit, voici l’homme du contrat et voilà le second témoin, et moi-même.
J’ai déclaré mon Islam, à Detroit, il y a deux semaines. J’ai souri en le
félicitant et j’ai appuyé sur sa main, alors que mes yeux se promenaient sur le
lit de Gina et que les larmes coulaient de mes yeux.
Gina s’est enfin
réveillée. En me voyant, elle a lancé un cri, Arkâne, Arkâne… N’étaient la
honte et la pudicité de l’Islam, je me serais jeté sur elle comme les
Américains sans me soucier des convenances. Mais le fait de désobéir à Dieu et
à l’honneur religion vraie m’a retenu.
Mais les sentiments
étaient très forts. Je me suis penché sur le lit, mettant ma tête dans les
couvertures. Je me suis mis à les embrasser dans les limites autorisées par la
Loi de Dieu, ce qui a attiré l’attention des personnes présentes et y a suscité
des sentiments humains.
Pendant que Gina
répétait mon nom, John m’a relevé et il m’a aidé á me remettre de mes émotions.
J’ai alors demandé à
l’autre témoin ce qu’il savait sur les formalités du mariage et il m’a dit
qu’il était celui qui était autorisé à procéder aux contrats dans le quartier
africain de West Palm Beach. Notre mariage a eu lieu sous les regards étonnés
des personnes présentes, dans une atmosphère où la tristesse et la joie se
mêlaient. J’ai alors trouvé que je pouvais donner libre cours à mes sentiments
et à ma passion. J’ai relevé un peu la couverture et je l’ai embrassée sur la
bouche d’une manière qu’aucun américain n’a jamais connue, ni imaginé.
J’ai levé la tête et
je me suis vu comme quelqu’un qui sort du Paradis pour se retrouver dans le
monde des souffrances. J’ai recommencé à passer ma tête sur sa poitrine et
entre ses épaules, puis j’embrassais de nouveau sa bouche, dans une ivresse où
la raison et le cœur étaient bien à leur place.
Je suis resté ainsi un
bon moment, répétant mes gestes affectueux, en épuisant tout ce que l’âme a
emmagasiné depuis des milliers d’années.
Les jours suivants ont
connu cette même chaleur romantique et cette griserie spirituelle, alors que
nous voltigions dans le royaume de la passion. Gina s’est rétablie et elle a
retrouvé ses forces. Son véritable médecin était mon amour et ses médicaments
ma passion autorisée par Dieu.
Mon oncle a perdu son
fils cadet alors qu’il suivait le traitement des autres membres de sa famille,
avec la possibilité de perdre son épouse et la compagne de sa vie, Umm Ahmad.
Cet événement a convaincu mon oncle qu’il fallait revenir au pays. Cependant,
c’était à Gina que revenait le mérite de l’avoir poussé à prendre cette décision.
En effet, les longues
discussions avec Gina, dans les circonstances où elles ont eu lieu, et son
désir d’aller en Iraq, l’y ont beaucoup préparé. En outre, John était l’un des
plus enthousiastes à l’idée d’y aller.
J’avais, auparavant,
informé Gina au sujet de ma mission et des symptômes de ses secrets et de ses
desseins ; et que il m’arriverait de disparaître parfois et qu’elle devait
l’accepter, en toute modestie. Elle n’a pas objecté, s’étant bien introduite
dans la religion de Dieu.
Une fois, elle m’a
posé cette question : « par Dieu, Arkâne, lequel des deux régimes,
celui de Saddam et le nôtre, ici en Amérique, est le pire ? » J’ai
dit non et sans hésitation : « calmes-toi, ma chérie, et sois sûre
que ta question ne m’embarrasse pas. L’exemple de l’Amérique et de Saddam est
comme l’exemple du diable et du misérable. Il est son partenaire dans ce qu’il
fait et il lui dicte ses obsessions. Quels que soient ses excès, le misérable
reste moins méchant que le diable et moins pervers. Si ma réponse ne te suffit
pas, saches Gina que Saddam allume les incendies chez les gens de l’Iraq alors
que l’Amérique attise les séditions partout dans le monde. Gina demanda, toute
perplexe, pourquoi les Arabes ne se sont pas intéressés à l’affaire
iraquienne ? » J’ai répondu : « ils observent sans cesse et
sans se fatiguer, mais ils ne voient ni ne trouvent rien. Leur situation
ressemble à la sienne et leur mal est le même. Le malheur de l’Iraq est une
caractéristique arabe générale, et la situation des peuples arabes est
semblable à la nôtre.
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